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Le génie de l'Orient, l’Europe moderne et les arts de l’Islam

Musée des Beaux Arts de Lyon

Exposition du 2 avril - 19 septembre 2011




Parcours de l'exposition

Article de Référence : exposition Le génie de l'Orient, l’Europe moderne et les arts de l’Islam, Musée des Beaux Arts de Lyon, 2011.

  • Éveils : aux sources de l’histoire des arts de l’Islam

    Les oeuvres islamiques commencent à être collectionnées et étudiées scientifiquement en Europe à partir de la fin du 18e siècle. On les considère d’abord comme des documents historiques et linguistiques ; progressivement cependant, leur dimension artistique commence à être prise en compte.

    L’intérêt des Occidentaux pour les arts de l’Islam est aussi ancien que leurs rapports avec l’Islam lui-même. Il n’a jamais cessé de nourrir, par les jeux de la fascination ou de la répulsion, une interrogation sur soi à travers la figure de l’autre.

    Le tournant du 18e et du 19e siècle introduit cependant une rupture majeure. C’est le début de nouvelles pratiques expansionnistes européennes, inaugurées par l’expédition de l’armée française en Égypte entre 1798 et 1801. Ce sont aussi les premiers moments d’une histoire de l’art à ambition scientifique, étendue aux mondes non-européens.

    Le cas français est particulièrement révélateur : la Révolution permet la constitution de collections publiques, au Louvre et à la Bibliothèque nationale, qui rassemblent des oeuvres auparavant dispersées dans les collections royales ou ecclésiastiques. Des collections privées apparaissent également, comme celle du duc de Blacas.

    Ces oeuvres sont essentiellement abordées comme des témoins pour comprendre l’histoire, les moeurs, les usages linguistiques des peuples de l’Islam. Les inscriptions et les textes constituent la principale raison de l’intérêt qu’on leur porte, comme l’atteste la publication en 1828 des Monuments musulmans du cabinet de M. le duc de Blacas, par le savant linguiste Joseph- Toussaint Reinaud.

    Cependant, un regard esthétique enrichit peu à peu l’approche documentaire. En 1866, lorsque le British Museum de Londres achète en bloc la collection Blacas, ce retournement est accompli.





  • Études : premières approches architecturales

    L’expansionnisme politique, économique et militaire européen favorise les voyages dont les artistes ont pour mission de raconter l’histoire en images. Une géographie fétiche de « l’Orient » islamique se met alors en place, où de grands pôles d’attraction – Grenade, Le Caire, Istanbul, Ispahan notamment – tiennent le devant de la scène. Cette renommée n’est pas due seulement à une aura de légende mais à des études architecturales minutieuses, animées par une passion de l’exactitude.

    Pour rassembler les acquis de l’expédition française en Égypte, une monumentale Description de l’Égypte… est publiée entre 1809 et 1829. Celle-ci est plutôt centrée sur l’Égypte ancienne, mais, dans son sillage, une série de publications consacrées aux hauts-lieux de l’Islam voit le jour entre les années 1830 et les années 1850. Leurs auteurs – souvent des architectes –, partis en quête de temples égyptiens, grecs ou assyriens, découvrent, dans les mosquées du Caire, d’Istanbul ou d’Ispahan, un monde de formes insoupçonnées.

    Dans leurs travaux, l’émerveillement se convertit aussitôt en analyses mathématiques et techniques. À contre-courant des rêveries orientalistes de certains artistes, ils soulignent la parfaite rigueur géométrique des ornements et des constructions.

    Rapidement, ces voyageurs nouent des liens entre eux et contribuent à faire naître l’idée d’une unité esthétique de l’Islam, fondée sur l’accord entre l’art et la science. L’Alhambra, prestigieux palais des derniers rois « maures » de Grenade au 15e siècle, s’impose alors comme le modèle par excellence de cette esthétique scientifique, où architecture et décoration ne font qu’un.

  • Récoltes : Albert Goupil, Collectionneur

    Au 19e siècle, l’afflux d’oeuvres islamiques en Occident est grandement facilité par la domination impériale qu’exercent progressivement les puissances européennes sur l’Afrique et l’Asie. Précédant les musées, certains amateurs privés constituent de spectaculaires collections motivées par le culte impérieux du « bel objet », mais également par l’angoisse de voir disparaître des cultures que l’Europe moderne contribue elle-même à fragiliser. L’appropriation matérielle reflète ainsi un double désir de captation culturelle et de préservation patrimoniale.

    Parmi les premiers collectionneurs d’objets « orientaux », Albert Goupil fait figure de pionnier. Fils d’un des plus grands marchands d’art parisiens, il accompagne en 1868 une expédition en Égypte conduite par son beau-frère, le peintre orientaliste Jean-Léon Gérôme. Sur place, il se passionne surtout pour les arts de l’Islam et poursuit son périple en Palestine, au Liban et en Turquie, jusqu’à Istanbul. À son retour à Paris, il consacre sa vie à sa collection, installée dans un « salon oriental », et dans un autre consacré aux arts de la Renaissance, le « salon occidental ». Dans ces espaces hybrides, à mi-chemin entre la mise en scène pseudo historique et la salle d’exposition, convergent, au cours des années 1870, amateurs et artistes.

    Parallèlement, Goupil organise la première exposition publique spécifiquement consacrée aux arts de l’Islam, à l’occasion de l’Exposition universelle à Paris en 1878. Il collabore également avec le musée des Arts décoratifs, pour y donner droit de cité à ces traditions.

    En 1888, après sa mort prématurée, sa collection est dispersée à l’Hôtel Drouot au cours d’une vente historique. Pour la première fois, certains musées se mobilisent pour y acquérir des pièces particulièrement remarquables : c’est notamment le cas du musée des Arts décoratifs à Paris et du musée des Beaux-Arts de Lyon.

  • Fantasmes : les arts de l’Islam dans la peinture orientaliste

    La peinture dite « orientaliste » se donne pour but de bâtir un monde parallèle, une échappée dans un rêve, qui va de pair avec un rejet de la modernité occidentale en marche : « tout excepté notre pauvre petit maigre et triste monde », comme l’écrit Jules Renard en 1889. Les arts de l’Islam sont alors enrégimentés dans la puissante machinerie visuelle de ce rêve exotique : théâtre d’automates où femmes voluptueuses, religieux exaltés et esclaves à la peau noire tournent indéfiniment sur fond de mosquées, de moucharabiehs et de palmiers.

    Reproduits avec une exactitude minutieuse dans des compositions souvent narratives, les objets d’art et les monuments de l’Islam doivent persuader les spectateurs de l’authenticité de ces scènes fantasmagoriques. De documents, ils deviennent décors, écrin d’un monde en lévitation, échappant à la réalité moderne.

    Cette fable « orientale » correspond exactement aux principes de la représentation académique. À la différence de la photographie, la peinture permet de donner à l’imaginaire les apparences chatoyantes de la réalité. Au cours d’innombrables voyages et séjours en « Orient », artistes et savants ont ainsi collaboré pour produire des représentations à la fois séduisantes et dépréciatives de ces cultures voisines : simultanément, on en célébrait le passé flamboyant et on en stigmatisait la décrépitude présente.

    Peu à peu, la nostalgie romantique pour un monde des origines s’est corrompue et transformée en production commerciale et répétitive de stéréotypes sur la cruauté, la sensualité ou le fanatisme « orientaux ». Les scènes érotiques et sadiques, en particulier, y sont les reflets déguisés, transportés en « Orient », d’obsessions propres aux sociétés occidentales.

    Véritable propagande par l’image, ces représentations sont la cellule-mère d’un exotisme de bazar dont le tourisme contemporain est aujourd’hui l’héritier.



  • Reflets : les Fortuny, de Grenade à Venise

    Chez le peintre catalan Mariano Fortuny y Marsal et chez son fils, le décorateur Mariano Fortuny y Madrazo, se reflètent les contradictions de l’orientalisme artistique européen. D’un côté, ils sont tributaires d’un système idéologique qui joue avec les clichés et les fantasmes. De l’autre, ils sont profondément bouleversés par leur rencontre avec ces arts qu’ils collectionnent avec passion et qui modifient leur regard.

    Le premier contact du peintre Mariano Fortuny avec « l’Orient » a lieu à l’occasion de la guerre coloniale menée par l’Espagne contre le Maroc, où il est envoyé, en 1860, par le gouvernement provincial catalan. A partir de là, tout en déployant dans sa peinture les stéréotypes de la fable orientale, il se consacre à la connaissance des arts de l’Islam, qu’il collectionne, en lien avec de grands amateurs parisiens comme Albert Goupil ou le baron Davillier. À Grenade, entre 1870 et 1872, Fortuny se passionne pour les céramiques arabo-andalouses à lustre métallique. Lorsqu’il meurt prématurément, à Rome, dans son atelier-musée conçu sur le modèle du « salon oriental » de Goupil, l’amateur d’arts de l’Islam qu’il est devenu tend à concurrencer le peintre en lui.

    Installé à Venise, son fils Mariano Fortuny y Madrazo s’engage dans la décoration. Par la virtuosité de ses créations textiles, il fascine l’Europe des lettrés et des mondains. Conçu comme le théâtre grandiose d’un monde de rêve, son palais-atelier est empli de ses collections de tissus précieux. Là, non sans mélancolie, il cherche à ressusciter un passé mythique. Par des techniques d’estampage gardées secrètes, il s’efforce de produire des effets où la couleur et la lumière comptent autant que l’allusion historique.

  • Figures : le modèle des « miniatures »

    Les Européens se sont attachés avec prédilection, au 19e siècle, à l’idée trop simple que l’art islamique était hostile à la figuration des êtres animés. Cette idée permettait d’opposer un monde d’images figuratives, en Occident, et un monde sans images, en « Orient », suscitant, pour cette raison même, à la fois l’admiration et le mépris. Au fur et à mesure du progrès des connaissances visuelles, ce cliché a cependant été remis en cause.

    Innombrables sont les objets islamiques figuratifs rassemblés en Occident. Parmi eux, les images venues d’Iran jouissent d’un prestige particulier, dont témoigne le succès parisien des copies réalisées par le jeune peintre Jules Laurens à Ispahan et à Téhéran en 1848-1849. Il n’empêche que les peintures persanes (qu’on appelle communément « miniatures ») restent assez mal connues jusqu’au début du 20e siècle. Elles sont souvent confondues avec les peintures en provenance de l’Inde moghole, qui constituent le principal support d’une comparaison avec la peinture occidentale.

    Dès les années 1820, ces peintures indiennes et parfois persanes sont observées par des artistes de la génération romantique, qui y trouvent l’occasion de rêveries iconographiques, mais aussi d’observations techniques sur la couleur et le dessin. En témoignent les études de Delacroix et de Chassériau, réalisées à partir des fonds des manuscrits et des estampes de la Bibliothèque nationale.

    Plus tard, Gustave Moreau s’inscrit dans cette lignée ; ses études de peintures indiennes l’incitent à pousser à son paroxysme, dans son oeuvre, la tension entre figuration et ornement.

  • Grammaires (1) : l’Islam Arts & Crafts

    Dans la seconde moitié du 19e siècle, la France et le Royaume-Uni promeuvent les modèles islamiques pour améliorer la qualité – et donc la compétitivité – de leurs productions manufacturées. Par leur rationalité, ces modèles peuvent s’adapter aux systèmes de production industriels. Par leur richesse ornementale, ils doivent stimuler l’invention des décorateurs ou « designers » modernes.

    Au Royaume-Uni, le plus fervent défenseur de la leçon de l’Islam est l’architecte Owen Jones. Dans sa Grammaire de l’ornement publiée en 1856, il donne aux cultures islamiques une place centrale. La notion même de « grammaire » constitue une déclaration de guerre à l’encontre des pastiches historicistes. Pour Jones, il ne s’agit plus de répéter des styles du passé, mais de comprendre des principes de création (comme on apprend les règles grammaticales). L’Islam est le meilleur maître en la matière : la rigueur avec laquelle les ornements s’y déploient, à partir d’un nombre minimal de formes élémentaires, rappelle à la fois les principes de la syntaxe et ceux de la musique engendrée par les sept notes de la gamme.

    La position de William Morris - véritable maître du mouvement Arts & Crafts (Arts et Artisanats) - et de ses proches est plus complexe. Leur violent rejet de la civilisation moderne, dans l’esprit de l’écrivain John Ruskin, les conduit à condamner tout processus industriel et à célébrer avant tout le Moyen Âge occidental. Mais ils se passionnent également pour les céramiques et les textiles « orientaux », où la profusion ornementale leur semble être l’indice de la joie physique de l’artisan au travail, par opposition au malheur de l’ouvrier industriel.

  • Grammaires (2) : l’Islam et le rationalisme décoratif français

    Le mouvement des « réformateurs » anglais, en matière décorative, a son parallèle en France, sous l’égide du rationalisme défendu par l’architecte Viollet-le-Duc. Avant tout attaché à l’architecture gothique, ce dernier encourage aussi, à partir des années 1860, des études sur les traditions non-occidentales. Il célèbre la « parfaite simplicité » des principes architecturaux et décoratifs islamiques, en s’opposant à la vision « féerique » des orientalistes, ces « partisans de la fantaisie en tout ».

    En dépit de ses propres convictions sur la suprématie de l’art persan, il soutient les études de son élève Edmond Duthoit en 1872, sur les monuments médiévaux de Tlemcen, en Algérie. Ces recherches contribueront à la protection du patrimoine islamique algérien, après des décennies de destruction sauvage par le colonisateur.

    Viollet-le-Duc préface également, en 1874, l’ouvrage de Léon Parvillée intitulé Architecture et décoration turques au XVe siècle. Parvillée, qui a vécu en Turquie et a restauré les monuments ottomans de la ville de Bursa, consacre le restant de sa vie, à Paris, aux nouvelles techniques de la céramique. Par ses collections, ses dessins et ses productions, il joue un rôle décisif dans la diffusion des arts ottomans en Europe.

    - Jules Bourgoin

    L’oeuvre de Jules Bourgoin, inspirée par l’Égypte islamique, témoigne de la singularité du regard de cet artiste, écartelé entre une lecture rationaliste et une appropriation subjective des ornements de l’Islam.

    Après d’éphémères études d’architecture à l’École des Beaux-Arts de Paris, Bourgoin fait trois longs séjours en Égypte entre 1863 et 1884, avec des incursions en Syrie et en Palestine. Parfois attaché à des missions archéologiques, il se montre cependant allergique à l’égyptologie et insoumis aux tâches qu’on lui confie. En revanche, il s’adonne avec passion à l’étude des ornements islamiques, sa « vocation irrésistible ».

    Se définissant lui-même comme un « véritable théoricien », il ne construit pour ainsi dire pas, mais publie entre 1868 et 1873 un monumental volume sur Les Arts arabes. L’ouvrage, préfacé par Viollet-le-Duc, est immédiatement considéré comme magistral, permettant enfin de « classer, étiqueter et ordonner le kaléidoscope musulman » (Louis Gonse), par les voies de la géométrie.

    Pourtant, cette lecture rationaliste ne reflète pas l’angoisse violente de Bourgoin face à la vision scientifique : « Je ne tardais pas à m’apercevoir que je faisais erreur en prétendant appliquer à des formes élaborées par un tout autre génie, et notre méthode de géométrie et notre art de dessiner ».

    A partir de là, il n’a plus qu’une idée : guérir l’Occident du « séparatisme odieux » entre science et émotion.

    En 1880, il publie une Grammaire élémentaire de l’ornement où commence à s’exprimer sa quête d’une langue universelle des formes, la « graphique », associant mise en ordre géométrique du monde et liberté subjective de la création. Il pousse progressivement cette démarche jusqu’à un point d’extrême tension, qui l’isole de ses contemporains et le conduit aux limites de la folie.

  • Pratiques : « Renaissance orientale », les ambiguïtés d’un mythe

    L’idée de « Renaissance orientale » apparaît au 19e siècle. Elle consiste à penser que « l’Orient » peut jouer, pour l’Europe moderne, le rôle que l’Antiquité gréco-romaine a joué au 15e siècle.

    Cette idée est d’abord philosophique et littéraire, centrée sur l’Inde. Puis elle se déplace vers les arts décoratifs, et fait référence à l’Islam. Les arts du feu – céramique et verre – sont particulièrement concernés.

    Maîtres-verriers et céramistes tentent notamment de percer les secrets du verre émaillé égyptien ou de la céramique polychrome ottomane, qui fascinent aussi bien pour leur excellence technique que pour leur originalité esthétique. En prenant ces arts anciens et raffinés pour modèles, certains grands artisans européens aspirent à conquérir le même prestige intellectuel que celui dont jouissent les artistes des beaux-arts. Ils se veulent les messagers d’un monde de formes nouvelles, qui n’imitent pas l’Antiquité gréco-romaine, mais en transforment complètement l’héritage.

    La fascination pour les verres et les céramiques de l’Islam explique que nombre de productions hésitent alors entre le pastiche et la véritable création. En témoignent les verres de Philippe- Joseph Brocard ou les céramiques de Théodore Deck, obsédé par le lustre métallique araboandalou et par le rouge d’Iznik.

    Inversement, c’est sans doute pour échapper à ce piège de la copie qu’Emile Gallé finit par s’écarter de toute référence à l’Islam à partir des années 1890, après y avoir puisé une partie de son inspiration.

    Quant au céramiste André Metthey, bouleversé par une exposition des « arts musulmans » au musée des Arts décoratifs en 1903, il décide de se consacrer à la « renaissance de la faïence stannifère », en s’appuyant sur les avancées contemporaines de la peinture.

  • « Révélations » : selon Matisse, selon Klee

    Depuis la Renaissance, l’art européen est dominé par la question de la ressemblance dans les images : la mimésis. Au début du 20e siècle, la remise en cause de ce principe d’imitation conduit certains artistes à explorer les approches élaborées par d’autres cultures. Découvrant les arts de l’Islam, Paul Klee et Henri Matisse y puisent, chacun à leur manière, un encouragement à transformer radicalement le rapport occidental avec les images, en dépassant l’opposition traditionnelle entre décoration et représentation.

    - Henri Matisse découvre les arts de l’Islam dans les collections privées, dans les musées et dans les expositions, notamment celle des « chefs-d’oeuvre de l’art musulman » à Munich en 1910. Le souvenir de cette exposition l’a accompagné toute sa vie, l’incitant à affirmer en 1947 : « La révélation m’est venue de l’Orient ».

    Parallèlement, il voyage en Algérie en 1906. Se désintéressant du « pittoresque », il s’y concentre plutôt sur le message formel des tapis berbères. Entre 1910 et 1913, il se rend également en Andalousie et à Tanger. Au même moment, il fait de la notion de « décoratif » le pivot de son esthétique : il ne s’agit plus pour lui d’inventer un nouveau style en peinture, mais un nouveau mode de rapport aux oeuvres d’art.

    Matisse revient à une inspiration orientaliste dans ses « odalisques » des années 1920, propres à nourrir les fantasmes des hommes de l’Entre-deux-guerres. Mais il retrouve sa grande vision décorative à la fin de sa vie, lorsqu’il réalise ses compositions en papiers gouachés et découpés. À la fin des années 1940, travaillant à la conception totale d’une chapelle pour les soeurs dominicaines de Vence, il déclare : « Nous aurons une chapelle où tout le monde pourra espérer, quelle que soit sa charge de fautes qu’il pourra laisser à la porte comme les mahométans laissent la poussière des rues à la semelle de leurs sandales abandonnées à la porte des mosquées ».

    - Paul Klee, au début de sa carrière, se consacre presque exclusivement au dessin. En même temps, il hésite à devenir un violoniste professionnel. Puis il voyage en Tunisie en avril 1914. À Kairouan, il découvre la Grande Mosquée, chef-d’oeoeoeoeuvre des 9e-10e siècles, avec ses coupoles hémisphériques, ses céramiques à lustre métallique, ses bois sculptés de décors végétaux et géométriques. Il note alors dans son Journal : « C’est le sens de cette heure merveilleuse : la couleur et moi, nous ne faisons qu’un. Je suis peintre. »

    Fût-ce sur un mode humoristique, Klee se présente désormais avec prédilection comme un mage « oriental », capable d’associer, en peinture, des éléments formels inspirés par les arts de l’Islam à un envol de l’imaginaire.

    Jusque dans les dernières années de sa vie, il reprend régulièrement le motif minimal et gracieux de la coupole hémisphérique des mosquées de Kairouan. Il utilise également volontiers le motif du tapis, en particulier dans les oeuvres qu’il réalise entre 1921 et 1931, alors qu’il enseigne à l’école d’architecture et de design d’avant-garde du Bauhaus, en Allemagne.

    Dans la plupart de ses oeuvres, une ébauche de narration semble trébucher et se perdre au sein d’un pur réseau décoratif ; inversement, des configurations abstraites paraissent sur le point de se transformer en signes cabalistiques. Battements incessants qui constituent autant de passages transgressifs, pour l’oeil et pour l’esprit, entre le royaume de l’ornement et celui du rêve.



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