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Louis de Funès

Article mis à jour le 04/07/20 18:49

Cinémathèque française, Paris

Exposition du 15 juillet 2020 au 31 mai 2021

Véritable homme-orchestre, de Funès était mime, bruiteur, danseur, chanteur, pianiste, chorégraphe, en somme un créateur, un auteur à part entière. À travers plus de 300 œuvres, peintures, dessins et maquettes, documents, sculptures, costumes et, bien sûr, extraits de films (La Folie des grandeurs, Les Aventures de Rabbi Jacob, La Grande Vadrouille, L’Aile ou la cuisse, la série des Gendarme...), l’exposition dévoile ainsi la diversité de son talent comique.



"Je révère Chaplin, Buster Keaton, mais ceux que j’aime d’amour, (…) c’est Laurel et Hardy. Pour moi, ce sont les plus grands des plus grands". Louis de Funès, à l’occasion de la sortie du film Le Gendarme et les Gendarmettes

La Cinémathèque française présente l'exposition Louis de Funès. L'expo de Funès est à voir à Paris à partir du 15 juillet 2020.

Louis, Germain, David de Funès de Galarza (1914-1983), né le jour de l'assassinat de Jaurès, à la veille de la Grande Guerre, est immortel. Au Japon, Louis de Funès serait Kakko Nintei : « Trésor National ». Véritable homme-orchestre, pour reprendre le titre d'un de ses films, Louis de Funès est mime, bruiteur, danseur, chanteur, pianiste, chorégraphe : c'est un créateur, un auteur à part entière. Ses succès sont vus et revus en France et dans le monde. Sa vis comica est intacte. Désormais célébré par cinq générations de spectateurs, l'exposition de Funès rend hommage à celui qui fut boudé par la critique. Il aura fallu une centaine de petits rôles, son génie burlesque de l'observation et de l'imitation, quelques lignes de Sacha Guitry, d'Audiard, et beaucoup de travail pour finir au sommet du box-office à 50 ans.

exposition louis de funès
Le Grand Restaurant de Jacques Besnard, 1966 © Gaumont


C'est l'ascension d'un sans-grade de l'après-guerre vers le star system, du petit chef au chef d'orchestre, le passage des années noires de l'Occupation au technicolor des Trente Glorieuses, des privations à la société de consommation et ses objets fétiches (la 2C, la DS…), de la soupe aux choux à la malbouffe... Pendant les Trente Glorieuses, la courbe des entrées des films de Louis de Funès recoupe celle de la croissance française.

La filmographie de Louis de Funès se confond avec notre histoire, des années noires de l'Occupation au Technicolor des Trente Glorieuses. Il est la juste incarnation des personnages les plus injustes. Ses rôles décrivent sa vie, l'ascension d'un sans-grade : du petit chef au chef d'orchestre, du sous-officier au capitaine d'industrie, des privations aux dérèglements de la société de consommation.



Si Louis de Funès incarne la France d'après-guerre, celle du gaullisme et du pompidolisme, c'est pour mieux moquer le théâtre de la hiérarchie sociale, ses cérémonies officielles, ses hochets et toutes les farces du pouvoir. Et s'il parle parfois une langue imaginaire, elle est universelle. Il est tellement populaire en Allemagne qu'on l'y rebaptise « Balduin », ou tout simplement « Louis ».

Ses personnages de tyrans domestiques échappent naïvement à la censure. En Pologne, en Russie et dans les pays du bloc soviétique, dans l'Espagne du général Franco ou la Grèce des colonels, il fait figure d'exutoire, comme si ses films permettaient de résister joyeusement à la tyrannie.

Tyrannique, menteur, roublard, ronchon, grognard, grognon, veule, voleur, prévaricateur, âpre au gain, lâche, traitre, assassin, égoïste, avare, raciste, râleur, colérique, manipulateur, escroc, parano, hystérique, bilieux, combinard, chauvin, arriviste, méprisant, obséquieux… Louis de Funès a si bien observé son prochain qu'il offre à travers ses films un miroir délicieusement déformant. Ses personnages souffrent et nous rassurent : de Funès, c'est nous en pire.

Son art est unique, il ne joue pas la même musique que les comédiens de l'époque. Il ne prend pas son temps, il l'accélère, lui donne le tournis, le contre et le tord (de rire). Celui qui se voyait avant tout en acteur de théâtre joue avec le spectateur de cinéma comme il le faisait sur scène. Il étire ses traits comme un élastique. Son jeu est surnaturel. Son diapason, toujours au bord de la syncope, emballe sa machine et son public. Il est pile électrique et face atomique.

Sa démarche saccadée héritée de ses héros du muet défile à la vitesse du son. Il mime, danse et bondit. D'abord le geste, puis la parole. Louis de Funès est un accélérateur de particules, et c'est sans doute ce tempo endiablé qui rend son jeu intemporel. Comme le disait Orson Welles, un film repose sur le rythme, « un film est tellement plus proche de la musique que de la dramaturgie ».

exposition louis de funès
La Folie des grandeurs de Gérard Oury. © 1971 Gaumont


L'angoisse de la chute grandit avec le succès. Craint-il de finir comme Buster Keaton ou ses chers Laurel et Hardy ? Pourtant, contrairement à d'autres vedettes comiques, comme Fernandel, Darry Cowl ou Fernand Raynaud, il en est à la cinquième génération d'aficionados. Et ce n'est pas fini.

Tout au long d'une vie trop courte, Louis de Funès perfectionne ses émotions, ses gueules, ses « expressions », qu'il préfère au mot « grimaces ». Contemporain de Donald Duck et d'Oncle Picsou, il possède une élasticité et une dynamique survitaminée qui font de lui un personnage de dessin animé aux yeux des plus petits. Dans Oscar, sa « tirade du nez » le pose en précurseur de Jim Carrey. Il faut regarder ses films image par image pour appréhender la vitesse de son jeu.

Ce pionnier de l'écologie, amoureux de la flore (une rose porte son nom), trouve son inspiration dans l'animal. De Funès est un zoo à lui tout seul : Blaireau dans Ni vu ni connu, Lebœuf dans Ah ! Les belles bacchantes, Charolais dans Carambolages et bien sûr, Pivert dans Les Aventures de Rabbi Jacob. Il orchestre une vaste ménagerie : le cochon de la rue Poliveau, dans La Traversée de Paris, le perroquet de La Folie des grandeurs, le poulailler du commissariat de La Belle Américaine ; il est aussi loup et agneau dans L'Homme orchestre, mouton dans Le Gendarme en balade, paon dans L'Avare...

Près de quarante ans après sa mort, il n'a jamais été aussi présent. Concertiste déconcertant, ses symphonies siphonnées n'ont jamais cessé de nous accompagner ; elles appartiennent à notre patrimoine. Boudés par la critique, ses succès continuent pourtant à faire rire les enfants de tous âges. Louis de Funès est un Trésor national.

L'exposition Louis de Funès à Cinémathèque Française de Paris s'affranchit d'un déroulé chronologique, pour mieux creuser les thèmes propres à son univers grâce à un corpus varié d'environ 300 œuvres : peintures, dessins et maquettes, documents, sculptures, costumes et, bien sûr, extraits de films. Elle propose au visiteur de découvrir la diversité du talent comique d'un comédien que le grand public reconnaît immédiatement, mais dont il ne connaît pas nécessairement tous les ressorts. L'exposition Louis de Funès à la Cinémathèque française se veut aussi une expérience pour le visiteur, une plongée dans le cinéma du comique préféré des français.

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