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Gauguin

Tate Modern, Londres

Exposition du 30 septembre 2010 au 16 janvier 2011




La Tate Modern présente une exposition consacrée à l’un des artistes les plus influents de la peinture de la fin du XIXe siècle, Paul Gauguin, comportant des peintures et des dessins du monde entier. Ses tableaux somptueux et colorés des femmes de Tahiti et ses paysages de Bretagne sont parmi les oeuvres les plus populaires de l'art moderne.

En s’attachant au mythe, à la narration et à son développement tout au long de la vie et de la carrière de l’artiste, cette exposition nous propose une vision tout à fait originale de l’oeuvre de Paul Gauguin.

Gauguin a commencé sa carrière comme impressionniste, mais tandis que ses collègues artistes utilisaient la peinture pour capturer l’aspect changeant de la nature, il soutenait que l’art devait aller au-delà des apparences matérielles. Il a développé un langage visuel radicalement simplifié, coupant à travers les détails superflus afin d’explorer des idées complexes chargées d’intensité poétique. Son travail a fait appel à une grande variété de sources visuelles et littéraires mêlées entre elles, comme les formes artistiques non-occidentales, la sculpture classique, les reproductions populaires, les caricatures, les textes philosophiques et anthropologiques ainsi que les mythes anciens et la Bible.

En se rendant au fond des contrées les plus reculées du monde, Gauguin s’est forgé une réputation calculée. De même, il a fait partie intégrante du milieu avant-gardiste parisien et il a contribué grandement au débat artistique de l’époque. En parcourant son évolution, cette exposition se penche sur son travail d’écrivain et de journaliste. Elle se concentre aussi sur sa façon qu’il a eu d’établir sa réputation artistique et sur son discours qui lui a permis de promouvoir son travail.

Plutôt que de suivre un ordre strictement chronologique, l’exposition « Gauguin: Créateur de Mythe » est organisée selon plusieurs sections thématiques qui soulignent les parallèles entre les différentes étapes de sa carrière. Rassemblant ici des travaux faits à Paris, la Martinique, la Bretagne, Tahiti et les Marquises, elle dévoile les motifs et les idées qui ont été repris et approfondis dans ses sculptures et ses peintures tout au long de sa carrière à des contrées éloignées.





  • IDENTITÉ ET MYTHOLOGIE PERSONNELLE

    Les autoportraits de Gauguin ont été un outil essentiel pour le façonnage et la refonte de son identité. Dans un premier temps, banquier bourgeois puis père de famille martyre et bohème avant de devenir, durant ses dernières années, le fameux « sauvage », son personnage changeant a attiré la curiosité et l’intérêt de ses contemporains. Ces diverses identités peuvent être perçues comme l’élaboration minutieuse d’une image publique, mais elles reflètent aussi les divers moyens dont Gauguin a eu recours pour se comprendre et se définir lui-même.

    La première oeuvre de cette salle le montre dans la vingtaine avancée, portant un fez noir souple, généralement associé aux artistes bohèmes et aux intellectuels de l’époque. Cette oeuvre a été exécutée plusieurs années après son mariage avec la jeune Danoise Mette Gad, lorsqu’il travaillait alors en tant qu’agent de change à Paris, tout en poursuivant la peinture comme passe-temps.

    Un autre autoportrait, exécuté presque dix ans plus tard, le montre à son chevalet essayant ainsi de s’imposer comme un artiste professionnel. Les poutres inclinées d’une chambre mansardée témoignent de sa situation financière plus limitée, tout en jouant sur l’image familière de l’artiste tirant le diable par la queue dans sa mansarde. Plutôt que de subir la pauvreté à Paris, la famille déménagea à Rouen, puis à Copenhague, où cet autoportrait a été réalisé et où Gauguin a travaillé comme vendeur de bâches de protection. Ayant du mal à gagner sa vie, il revint en France sans sa femme. Ils ne se reverront alors que très peu de fois.

    Bien qu’il ne semble pas avoir peint d’autoportraits au cours de son premier séjour à Tahiti en 1891-3, ceux qu’il réalise dès son retour à Paris promeuvent son image d’artiste qui avait osé se déraciner à l’autre bout du monde et qui était devenu « un natif ». Dans cette salle, il se représente dans Manao Tupapau de 1892. Dans une autre oeuvre, ses traits réfléchis se retrouvent au côté de l’un de ses « tikis » sculptés, une figurine fétiche en bois montée sur artefact d’origine océanique.

    Son dernier autoportrait peint a été réalisé en 1903. Cette période correspond à son retour vers les mers du Sud lorsqu’il vivait aux Marquises, isolé et en mauvaise santé. Ses cheveux coupés courts et sa tunique blanche dévoilent ses traits maladifs, tandis que les lunettes lui confèrent une qualité d’introspection. Lorsqu’il représente cette image de mortalité vulnérable, Gauguin était vigoureusement engagé dans des batailles prolongées avec les autorités coloniales.

  • RENDRE LE FAMILIER ÉTRANGE

    Dans les mains de Gauguin, la nature morte est rarement simple. Il perturbe les attentes du spectateur ou introduit une présence humaine - soit directement, comme la fille scrutant le bord de Still Life with Fruit (Nature Morte aux Fruits) de 1888, soit par un objet significatif - qui modifie notre perception que nous avons de l’oeuvre.

    Plusieurs de ces scènes d’intérieur représentent un reflet des secrets de la vie domestique, avec ses drames cachés, dévoilés ici à travers des détails et des allusions visuelles. Les oeuvres d’art qui apparaissent dans le fond de certaines peintures plus anciennes soulignent peut-être ici sa vocation artistique – devenant de plus en plus une source de tension entre Mette et lui-même. Inside the Painter’s House, Rue Carcel (Intérieur du Peintre, Rue Carcel) de 1881 représente leur maison de Montparnasse, au sommet de leur prospérité familiale, peu de temps avant qu’un krach boursier ne persuade Gauguin d’abandonner finalement sa carrière dans la finance et de devenir un artiste à plein temps.

    Un autre aperçu de la vie domestique est dévoilé ici dans les portraits de Clovis et d’Aline pendant leur sommeil, dans lesquels Gauguin semble entrer dans l’imagination de ses enfants. Par exemple, dans The Little One is Dreaming, Study (La Petite rêve, Etude) de 1881, les images d’oiseaux sur le papier peint, une poupée bouffonne et une inscription musicale font peut-être allusion aux rêves que les enfants sont en train de faire et de nombreux détails naturalistes y sont dépeints.

    Un certain nombre de tableaux comprennent des objets réalisés par Gauguin lui-même, apparaissant comme un signe de sa présence. La sculpture sur bois avait été un passe-temps de Gauguin depuis son enfance, et il a continué à façonner des objets ou des petites sculptures tout au long de sa vie. Il a commencé à se consacrer à la céramique dès l’hiver 1886-7 au côté du chef de file Ernest Chaplet. C’est alors qu’il réalise une série originale de pots et de sculptures en argile. Alors qu’il éprouvait encore des difficultés à s’affirmer stylistiquement en peinture, ces poteries – influencées par l’artisanat précolombien – semblent combler sa puissance imaginative.

    Cette salle comprend également un ensemble d’oeuvres exécutées par son ami, Jacob Meijer de Haan. Gauguin était devenu un mentor pour l’artiste néerlandais, et les deux hommes partageaient ensemble un atelier et un gîte en Bretagne. Les traits distinctifs de De Haan se retrouvent dans plusieurs tableaux de Gauguin et représentent peut-être une sorte d’alter ego.



  • VIE ET TEMPS FORTS 1848–1891

    Voici l’une des deux salles où est rassemblée une sélection de livres, de lettres, de photographies et d’autres ressources documentaires qui illustrent la vie de Gauguin, ses lectures, ses écrits, les lieux où il a travaillé et ses relations avec les poètes, les critiques et les autres artistes de son époque.

    Ici est dévoilé son milieu familial, y compris sa grand-mère maternelle Flora Tristan - une pionnière socialiste et féministe éminente - et son tuteur, le riche financier et collectionneur d’art Gustave Arosa. D’autres sections se concentrent sur la Bretagne, à la fois comme un lieu mythique dans l’imaginaire populaire, et comme un important tremplin dans la carrière de l’artiste. Les relations complexes de Gauguin avec les impressionnistes et les poètes, ainsi que les critiques d’art du mouvement symboliste sont également explorées. Cette salle se termine avec l’Exposition universelle tenue à Paris en 1889, à laquelle Gauguin organisa une exposition de groupe au café Volpini. Toutefois, ce sont les affiches ethnographiques de l’Esplanade des Invalides, avec des reconstitutions de la vie indigène tirées des colonies de la France dans le monde entier, qui ont capturé l’imagination de Gauguin et stimulé ses rêves pour son « atelier des tropiques ». Ceci est abordé plus loin, dans la deuxième partie - salle 8 - dans laquelle la vie de Gauguin de 1889 à 1903 est documentée.

  • DESSINS DE GAUGUIN

    « Un critique chez moi voit les peintures et…me demande mes dessins. Mes dessins! que nenni: ce sont mes lettres, mes secrets. » (Avant et après, 1903)

    Alors que les impressionnistes ont privilégié la peinture en plein air, leur permettant ainsi de retranscrire leurs émotions visuelles à même la toile, Gauguin préférait travailler en atelier car l’imagination et la pensée le guidaient à établir une certaine composition. Néanmoins, l’observation directe - en particulier de la figure humaine - a été un élément crucial dans son processus créatif. Partout où il s’est rendu, le dessin a été un moyen d’assimiler son environnement, et il a réalisé de nombreuses esquisses de visages, de corps, de postures, de vêtements, d’animaux et de plantes qui ont été reprises plusieurs fois, parfois dans ses peintures. Comme il l’a écrit à un ami de Tahiti, le contenu de ses carnets de croquis était pour lui : « beaucoup de recherches qui peuvent porter leurs fruits, de nombreux documents qui, je l’espère, seront utiles pour une longue période en France ».

    Gauguin a développé dans ses dessins un style propre simplifié et épuré, influencé par le puissant coup de crayon d’Edgar Degas, la ligne incisive des caricaturistes français tels que Honoré Daumier et Jean-Louis Forain, et la liberté de l’artiste japonais Hokusai. En effet, ses dessins soulignent le contour et renoncent à ce qu’il considérait des détails analytiques redondants. Lors de son enseignement du dessin qu’il donna brièvement dans un atelier à Montparnasse, il négligeait l’exactitude représentative de l’oeuvre au profit du beau et du conventionnel. En se concentrant sur autre chose, la technique selon lui venait d’autant plus vite avec la pratique.

  • LA REPRÉSENTATION DU PAYSAGE ET DE LA CAMPAGNE

    Les raisons qui ont poussé Gauguin à quitter Paris et sa banlieue semblent avoir essentiellement été d’ordre économique. Quand il a commencé à travailler en Bretagne en 1886, il était séduit par le coût bas de la vie et les loyers estivaux à faibles prix. Il était aussi fasciné par les scènes pittoresques de cette région et sa culture traditionnelle, ce qui le poussa à y retourner de nombreuses autres fois. Les gens et le paysage étaient devenus des sujets importants pour lui. Comme il l’écrivit plus tard : « J’aime la Bretagne, j’y trouve le sauvage, le primitif. Quand mes sabots résonnent sur ce sol de granit, j’entends le ton sourd, mat, puissant que je cherche en peinture. »

    Suite à un malheureux voyage à Panama où il attrapa la malaria et la dysenterie, il séjourna en convalescent pendant cinq mois en Martinique à partir de 1887. Néanmoins, son expérience et son travail sur l’île des Caraïbes furent majeurs dans son développement artistique. Les peintures qu’il y réalisa puis qu’il exécuta à son retour à Paris traduisirent l’immédiateté de sa rencontre avec un environnement complexe et exotique qui ne correspondait pas exactement à sa vision romantique de départ. La végétation luxuriante sous un soleil tropical est rendue grâce à une intensité onirique de couleurs et une composition en aplat, bouleversant ainsi les idées traditionnelles européennes reçues de la perspective, langage stylistique qu’il développa de retour en Bretagne et plus tard lors de ses voyages à Tahiti.

    Pour Gauguin, l’essence même d’un pays ou d’une région se trouvait dans ses habitants et dans leur façon de vivre dans leur milieu. Tandis que ses esquisses ont montré une étude détaillée de la population locale, les peintures qu’il réalise par la suite représentent à la fois une réalité observée mêlée à sa propre vision subjective. Il a parfois repris des clichés populaires comme le stéréotype condescendant de la simplicité supposée des Bretons avec celle des oies ou les vaches. En s’inspirant des traditions folkloriques et des objets locaux, il a réalisé des travaux qui semblent indiquer une manière locale propre de voir le monde.

  • THÈMES SACRÉS

    Dans ses conversations et ses écrits, Gauguin se présentait lui-même comme fortement opposé à l’Église chrétienne. Néanmoins, son art est pourvu de thèmes et d’images religieux, provenant pour la plupart de l’Ancien et du Nouveau Testament ainsi que des mythes et des croyances d’autres cultures.

    Gauguin commença à aborder ces sujets lorsqu’il travaillait en Bretagne. Parmi les qualités distinctives de la région qu’il a saisies, figure la foi religieuse catholique profondément enracinée et influencée par les anciennes croyances celtiques. La spiritualité puissante de la Vision of the Sermon (Jacob Wrestling with the Angel), (Vision du Sermon (la Lutte de Jacob avec l’Ange)) de 1888 est présentée par la foi naïve des femmes victimes devant leur apparition. Cette oeuvre est considérée comme une étude quasi-anthropologique et religieuse. Elle représente une avancée stylistique dans l’art de Gauguin grâce au contour marqué et aux couleurs vives proches de celles de l’art du vitrail – procédé pictural plus connu sous le nom de « cloisonnisme », découlant d’une technique médiévale du travail décoratif de l’émail.

    Lorsque Gauguin embarqua pour la première fois pour Tahiti en 1891, un de ses objectifs était « d’étudier les coutumes et les paysages du pays ». Il avait prévu de s’immerger dans une culture païenne dans un cadre tropical luxuriant. À l’arrivée, cependant, il fut amèrement déçu de découvrir que les missionnaires avaient converti avec succès les habitants de l’île au christianisme depuis plus d’un siècle, laissant peu de traces aux traditions du passé. L’ouvrage principal qui lui procura le plus de renseignements est celui de Jacques-Antoine Moerenhout intitulé Voyage aux Îles du grand Océan (1837), une étude sur l’histoire et la culture de la région, réalisée à partir d’entretiens avec une poignée de personnes âgées tahitiennes. Utilisant cet ouvrage en partie fiable, Gauguin se mit à explorer ces mythes perdus dans son art en faisant référence à des divinités qu’il imagina tels que Hina, la déesse de la lune, et Tefatu, le dieu de la terre. Il sculpta ses propres figurines fétiches en bois qu’il représenta ensuite dans ses peintures, et qui semblent une fois peintes être des artefacts patinés par le temps. Par l’art de Gauguin, ces mythes anciens ont pu ainsi reprendre place au coeur de la vie quotidienne de Tahiti.

    Par ailleurs, beaucoup de ses peintures polynésiennes ont continué à explorer des thèmes traditionnels chrétiens, en plaçant des sujets tels que la Nativité et la Vierge et l’Enfant, dans un décor tahitien. Son goût pour le dessin provenant de sources éclectiques peut faire penser qu’il a pu s’inspirer des peintures murales égyptiennes, des sculptures bouddhistes ou de la pose qu’adopte les danseuses javanaises, comme s’il créait un équivalent visuel à son intérêt croissant pour l’étude comparative des religions du monde.

  • L’ETERNEL FÉMININ

    Le regard de Gauguin face à ses sujets féminins changea dès qu’il endossa le rôle d’artiste-touriste. Ses voyages vers des endroits de plus en plus reculés lui offrirent des décors où il pouvait désormais imaginer une vie pré-moderne. Dans la représentation de tels lieux, il présenta la femme comme une figure intemporelle plutôt qu’un sujet défini. Son histoire s’inspirait des contes populaires locaux, de la Bible et de la mythologie classique. Toutefois, Gauguin s’épargnait d’en faire une image allégorique et classique, et plutôt que d’en faire une représentation idéalisée, il introduisit pour la représenter des éléments inattendus et parfois grotesques dans ses toiles.

    L’intérêt de Gauguin pour les archétypes culturels est lié à son attirance pour le mythe romantique de l’« Eternel Féminin », largement invoqué par les artistes et les écrivains symbolistes de l’époque, et pour lesquels une femme était un être spontané et spirituel, qu’elle soit aussi bien tentatrice méchante que vierge sainte. Cette salle explore quelques-unes de ses plus marquantes représentations de la figure féminine.

    "Ondine"

    En s’inspirant de ses observations naturalistes de femmes près d’une rivière bretonne, Gauguin replaça son personnage par une femme symbolique dans les vagues, dépouillée d’attributs sociaux. Une oeuvre de 1889 sur ce thème a reçu le titre d’Ondine, invoquant le conte populaire allemand d’une ondine qui obtient une âme en épousant un homme, dans le seul but de délivrer une malédiction fatale sur son mari pour punir son infidélité. Cette femme seule dans les vagues se retrouve également dans les peintures, les éventails et les sculptures sur bois. Plus tard, Gauguin abandonne les femmes au bord de l’eau dans ses peintures polynésiennes en instaurant une sociabilité dans les scènes qu’il choisit.

    "Eve"

    Gauguin a jonglé avec deux images contrastées d’Eve, la femme fatale qui se retrouve dans la mythologie judéo-chrétienne. L’une est placée dans un endroit fermé, posture voûtée, tandis que l’autre se tient fièrement, grande et sans honte. Sur le plan ethnique, il distinguait deux types d’Eve, la présentant d’une part de race blanche et la montrant d’autre part comme une « Eve exotique ». Ces représentations furent initialement créées d’après plusieurs sources diverses: une frise de Java, une photographie de sa mère et peut-être une miniature indienne. Les Eve précoces sont identifiables par la présence d’un serpent, mais pour sa composition de la Tentation à Tahiti, Gauguin représenta un lézard noir ailé, parce que les serpents étaient inconnus sur l’île.

    "Pape Moe"

    Traduit comme « l’eau mystérieuse », Gauguin a donné le titre de Pape Moe à un certain nombre d’oeuvres qui montrent un personnage féminin se penchant sur un rocher au bord de l’eau pour boire à partir d’une source naturelle. Pour cette oeuvre, Il s’est principalement inspiré d’une photo prise par Charles Spitz (dans laquelle l’eau sort en fait d’un tuyau) en omettant toute qualité poétique et spirituelle, à un moment où il revenait à la figure humaine dans ses peintures, estampes et sculptures. Dans le livre Noa Noa de Gauguin, la scène est décrite comme si elle était le témoignage initial de l’artiste. Peut-être que la variante la plus frappante est la sculpture en bois en relief dans laquelle le printemps est devenu une chute d’eau et dans laquelle des visages mystérieux semblent émerger de la végétation.

    "Oviri"

    Oviri de 1894, tiré d’un mot tahitien signifiant « sauvage », a été considérée par Gauguin comme étant sa plus importante sculpture en céramique. Rejetant les canons occidentaux classiques de la grâce et de la beauté, cette divinité volontairement déformée et disproportionnée est l’un de ses personnages féminins le plus puissant et effrayant de son répertoire. Cette sculpture s’est d’ailleurs vue refuser l’accès à un salon des Beaux-Arts, habituellement libéral à Paris en 1895, probablement en raison de sa laideur.

    Le personnage trépignant une louve à ses pieds n’est pas sans rappeler la peinture de Delacroix de la mère meurtrière Médée. Les sculptures menant à Oviri comprennent Black Venus (La Vénus Noire) de 1889, qui montre une femme agenouillée sur une tête coupée qui ressemble à celle de Gauguin, et Lewdness (La Luxure) de 1890, un personnage féminin accompagné par un renard, animal que l’artiste a parfois associé à lui-même. Confirmant sa profonde identification avec cette déesse un peu androgyne, il a demandé que la sculpture soit placée sur sa tombe.

  • VIE ET TEMPS FORTS 1889–1903

    Cette deuxième salle documentaire présente la vie de Gauguin de 1889 à 1903 en abordant aussi sa renommée posthume. Les dernières années de sa vie sont marquées par ses deux voyages à Tahiti dont l’archipel des Marquises. La fascination de Gauguin pour les tropiques n’est pas unique. Des écrivains de voyage comme Pierre Loti, les musées ethnographiques et les expositions de l’époque montrent une fascination générale pour l’étranger qui est à associer au colonialisme du XIXª siècle. Toutefois, Gauguin fut le premier à s’immerger au coeur de la culture et du folklore tahitiens, dépassant l’attrait pour l’exotisme superficiel.

    Avant même de quitter Paris, son exil qu’il s’était lui-même imposé confirma le statut de son personnage et fut célébré lors d’un banquet d’adieu par le poète symboliste Stéphane Mallarmé. Le mythe autour de son personnage continua à se développer pendant son absence et se révéla vraiment après sa mort, à travers le travail d’écrivains tels que celui de Victor Segalen et de Somerset Maugham dont le personnage de sa meilleure vente The Moon and Sixpence (La Lune et Soixante-quinze Centimes) était directement inspiré de la vie de Gauguin.

  • LES TITRES DE GAUGUIN

    Les mots sont un élément essentiel dans l’oeuvre de Gauguin. Il a expliqué que ses peintures présentaient une « qualité musicale » - la composition, le trait et la couleur - et une « qualité littéraire » la création d’une narration justifiant de ses choix esthétiques. Le titre était une partie essentielle de son processus créatif, notamment lorsqu’il l’incisait dans le cadre ou l’inscrivait sur la toile. Cependant, ces bribes de phrases ne dévoilaient pleinement la signification de ses oeuvres. Leurs histoires restaient ambiguës.

    Quand il choisissait des titres tahitiens pour ses peintures, l’évocation de ce monde exotique pour un occidental semblait pour lui être une caractéristique aussi importante que la signification même du mot employé. Sa propre compréhension de la langue tahitienne était inégale, mais il était séduit par les bribes de phrases qu’il comprenait à peine autour de lui et qu’il notait sous forme de proses une fois traduites. En effet, les mots inconnus qu’il intégrait dans ses peintures étaient pour lui un moyen d’instaurer une distance entre le spectateur européen éloigné et ce monde tropical. Plusieurs de ses titres de tableaux tahitiens sont sous forme de questions: Où allez-vous ? ou encore Êtes-vous jaloux ? et paraissent être en fait des fragments de conversation entre ses personnages rappelant de petites pièces de théâtre.

  • CONTEUR D’HISTOIRES

    Noa Noa, l’oeuvre écrite de Gauguin la plus connue et la plus complète rassemble ses notes sur la croyance religieuse de Tahiti et ses expériences personnelles sur cette l’île. Il commença à y travailler dès son retour en France en 1893, et il présenta cet ouvrage sous forme de livre d’artiste et de voyage. En étant le « conteur » dans tout le texte, Gauguin joua sur son rôle ambivalent de narrateur et d’aventurier. Son récit est entrecoupé de commentaires et de poèmes de l’écrivain symboliste Charles Morice, qui semble s’adresser à un public imaginaire français, intrigué, mais perplexe quant aux notes et aux images exotiques présentées par Gauguin.

    Dans ce livre, Il réalisa dix gravures sur bois qui illustrèrent les mythes tahitiens sur les origines de la vie, mentionnés dans le texte. Sa technique d’impression rudimentaire – il a été rapporté qu’il aurait utilisé son lit comme presse - et son penchant pour les encres, le choix du papier et les diverses pressions ont fait de chaque ouvrage des livres uniques. Sa fascination pour la relation entre le texte et l’image se retrouve dans d’autres travaux, comme Cahier pour Aline, un album de coupures de presse, des dessins et des notes sur son travail. Son ton dans le texte et l’impression qu’il utilise va du solennel et du mystificateur au sardonique et à l’humour. A Tahiti, il a même lancé son propre journal satirique Le Sourire, pour attaquer les institutions coloniales. Et dans le court texte autobiographique achevé l’année de sa mort, il y confirma sa réputation d’artiste rebelle d’innovateur et de libertin en contant sa propre histoire sous l’oeil du public et en vue de sa renommée.

  • LE PARADIS TERRESTRE

    Bien que Gauguin ait été déçu de trouver Tahiti occidentalisé, il fit de son mieux pour promouvoir le mythe de son existence insouciante dans un éden tropical. Son statut de territoire annexé par la France - avec la bureaucratie coloniale et un service postal régulier – lui permit de gérer sa carrière loin de sa clientèle européenne, et de suivre de près la façon dont son oeuvre évoluait sur le marché de l’art parisien.

    Sa deuxième période à Tahiti, de 1895 à 1901, fut menacée par l’instabilité financière et troublée par sa mauvaise santé suite à une blessure à la cheville et à l’apparition de la syphilis. Cependant, le mythe séculaire du « Paradis Terrestre » persista dans son imagination et continua à nourrir ses tableaux. Ses observations de la vie quotidienne lui inspirèrent des compositions plus complexes, aux personnages multiples qui selon lui exprimaient la vie en plein air et intime de l’île : « Tahiti fabuleuse…ces femmes chuchotant dans un immense palais décoré par la nature elle-même ».

    En 1901, il s’installa à Hiva-Oa aux Marquises, l’un des groupes d’îles les plus éloignés du monde. Déterminé à provoquer ses voisins, en particulier l’évêque catholique, il entailla les mots Maison du Jouir, ou Maison du Plaisir dans les linteaux élaborés de l’entrée de sa maison. Certaines de ses oeuvres tardives suggérèrent des thèmes de mortalité et de départ : le cavalier à capuchon dans The Ford (The Flight), (Le Gué (Le Vol)) de 1901 a été considéré comme l’incarnation de la mort, alors que le navire en arrière-plan se prépare à détourner son chemin. Gauguin restait pourtant un personnage querelleur. Il se trouvait au milieu d’une dispute avec les autorités coloniales car il refusait de payer ses impôts lorsque, affaibli par la syphilis, il mourut de troubles cardiaques en mai 1903.



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